Y a-t-il un coach pour entraîner le PSG ?

Comme souvent, quand arrive le printemps, une question bien connue des supporters parisiens revient sur le devant de la scène : quel coach faut-il au Paris Saint-Germain pour lui permettre de franchir un cap ?

Quel est le coach idéal pour Paris ?
La même question revient sans cesse…

Depuis que le Qatar a pris les rênes du club en 2011, le PSG s’est forgé, au niveau national, un palmarès conséquent. Chaque entraîneur passé par le camp des loges a réussi à décrocher le titre de champion et à remporter au moins 1 fois (hormis Carlo Ancelotti et en attendant le bilan définitif de Christophe Galtier) la coupe de France. Alors que d’autres écuries seraient pleinement satisfaites d’un tel bilan, le club de la capitale est sans cesse à la recherche d’un nouveau coach, persuadé que celui déjà en place ne fait pas l’affaire. Un coach (expérimenté et respecté si possible) qui serait capable de gérer les égos, d’imposer sa « patte » sur le jeu, d’avoir des certitudes tactiques, de bâtir une équipe de guerriers… tout cela dans le but ultime d’installer le PSG sur le toit de l’Europe (et pas uniquement au sommet de la L1).

Sur le papier, le défi à relever est excitant, voire passionnant. D’autant que les investisseurs qataris possèdent la manne financière pour concurrencer les plus grosses cylindrées continentales et pour mener à bien un tel projet. Pourtant, force est de constater que les « grands » entraîneurs ne se bousculent pas au portillon, et que le PSG semble, depuis le limogeage de Laurent Blanc en 2016, choisir ses coachs plus par défaut que par profonde conviction.

Car chaque fois que des noms prestigieux circulent autour de la sphère parisienne (Mourinho, Guardiola, Simeone, Zidane, Ancelotti…), il faut admettre que c’est une petite surprise de voir des coachs comme Unai Emery, Thomas Tuchel, Pochettino et, dernièrement, Christophe Galtier, débarquer sur le banc de touche…

Pourquoi les tacticiens les plus chevronnés se montrent-ils réticents à l’idée de venir poser leurs valises dans un club aussi ambitieux que le Paris Saint-Germain ? Les réponses sont malheureusement multiples.

Un projet sportif confus

Une nouvelle fois, le PSG s’est fait éliminer en
1/8 de ligue des champions cette année.

Lorsque les Qataris s’approprient le PSG en 2011, le club lutte tant bien que mal dans son propre championnat et a disparu des radars sur la scène européenne. Le projet de redonner ses lettres de noblesse au club de la capitale est prometteur, ambitieux, et mené de manière cohérente par le directeur sportif de l’époque, Leonardo. Ce dernier parvient à installer rapidement sur le banc un certain Carlo Ancelotti, en décembre 2011, en remplacement d’Antoine Kombouaré (qui, soulignons-le, n’a pas démérité). L’équipe bâtie a des fondations solides, avec des joueurs de talent auxquels s’ajoutent des joueurs de devoir.

Très vite, avec Ancelotti puis Laurent Blanc, le PSG redevient l’ogre qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être sur le plan national, et effectue des parcours respectables en ligue des champions (en atteignant 4 fois consécutives les 1/4 de finale).

L’élimination tragique en 1/8 de finale contre le Barça, en 2017, va tout bouleverser : pour se renforcer, le choix est fait de mettre « tapis » sur des stars que tout le monde s’arrache (Neymar, Mbappé). La « franchise PSG » se développe considérablement et entre dans une autre dimension en ce qui concerne le marketing et le merchandising. Jamais le club de la capitale n’a eu autant de « followers » et vendu autant de maillots ou produits dérivés. Parallèlement, hélas, le projet sportif patine, avec 2 campagnes européennes décevantes (éliminations en 1/8 par le Real en 2018 et par Manchester United en 2019).

L’histoire semble enfin sourire à Paris quand l’équipe parvient 2 ans de suite, en 2020 et en 2021, à se hisser en finale et en 1/2 finale de ligue des champions. Mais rattrapé par le fair-play financier et plombé par des transferts ratés ainsi qu’une masse salariale exorbitante, le club ne parvient pas à remplacer avantageusement certains joueurs confirmés et l’équipe paraît de plus en plus déséquilibrée. D’autant qu’il continue de persévérer dans la voie du merchandising en enrôlant, à l’été 2021, Lionel Messi (34 ans) et Sergio Ramos (35 ans). Des icônes libres de tout contrat, certes, sans indemnités de transfert à devoir débourser, mais des joueurs très coûteux pour les finances du club, surtout au regard de leur âge et, malheureusement, de leur rendement sur le terrain…

Depuis 2017 et l’arrivée de Neymar et Mbappé, des joueurs comme Yuri Berchiche (2017), Thilo Kehrer et Gianluigi Buffon (2018), Leandro Paredes, Ander Herrera, Pablo Sarabia et Abdou Diallo (2019), Mauro Icardi et Rafinha (2020), Georginio Wijnaldum (2021), Carlos Soler, Fabian Ruiz et Hugo Ekitike (2022), sont arrivés au club sans avoir pu justifier l’intérêt du PSG à leur égard… et contribuant à dresser ce constat sans appel (que l’élimination récente face au Bayern a mis en lumière) : le PSG s’est affaibli.

Si développer le merchandising est une chose on ne peut plus légitime, il est temps que les décisionnaires qataris comprennent que cela ne peut se faire au détriment du projet sportif. Car ce sont les résultats sur le rectangle vert qui rendront le PSG puissant. Les paillettes attirent les « followers » sur les réseaux sociaux et les « people » au Parc des Princes, mais ne permettent pas d’installer le PSG à la table des grands. Pour cela, il faut des victoires. On juge un club à son palmarès, pas aux joueurs (aussi talentueux soient-ils) qui y sont passés.

Les victoires se construisent non pas en empilant des stars ou des mercenaires sur une pelouse, mais en bâtissant une équipe homogène constituée de joueurs complémentaires et fiers de porter leurs couleurs. Et on ne parvient pas à ce résultat en jetant son dévolu sur tout ce qui brille ou sur des opportunités de transfert (comme ce fut le cas en engageant Donnaruma alors que Navas se montrait impérial). Tous les entraîneurs connaissent la chanson, et il est compréhensible que les plus grands réfléchissent à 2 fois avant de s’engager dans le projet parisien.

Des problèmes d’institution

Au Paris Saint-Germain, l’institution
est-elle vraiment au-dessus des joueurs ?

Les derniers entraîneurs qui ont dirigé le club de la capitale ont tous laissé aux supporters un sentiment d’inachevé, voire de gâchis. Une désagréable impression de ne pas avoir pu mettre en place leurs idées. Certains se sont heurtés au refus du groupe d’adhérer à leur schéma tactique (Emery), d’autres ont été obligés de faire jouer leurs stars en méforme (Pochettino, Galtier), d’autres encore se sont trouvés en conflit ouvert avec le directeur sportif (Tuchel)… laissant planer le doute qu’il manque un véritable patron capable de remettre de l’ordre dans ce gentil « bordel ».


On entend dire, de manière récurrente, que le club de la capitale doit se doter d’un coach emblématique capable, rien qu’en étalant son CV, de gérer les égos et de faire adhérer le groupe à son discours. Un diplomate, donc, mais qui soit quand même « fort en gueule » (pour motiver et transcender les joueurs), maître tacticien bien sûr et ayant la culture de la gagne. Le tout en faisant développer un football « champagne » à son équipe… Soyons sérieux : les critères de sélection sont aussi nombreux que les grains de sable dans le désert du Sahara. Et si le PSG en est à chercher un tel coach, c’est que les véritables problèmes se situent ailleurs !

Est-il normal que l’entraîneur en place se retrouve constamment en porte à faux ? Remontons à l’époque de Laurent Blanc : insulté et raillé par un joueur (Serge Aurier) sur les réseaux sociaux, le technicien français s’est trouvé seul à gérer cette situation. Aucune communication, aucun soutien de la part de la hiérarchie. Le mutisme du club en a alors dit long sur ses difficultés à prendre ses responsabilités. Écarté par Laurent Blanc, le joueur a par la suite réintégré l’effectif à quelques jours d’un match décisif de ligue des champions. Difficile, dans ses conditions, de donner à l’entraîneur l’impression qu’il a la main sur son groupe…

Il ne s’agit pas, malheureusement, d’un cas isolé. A plusieurs reprises le PSG a raté l’occasion de placer l’institution au-dessus de tout.
Quand Zlatan affirme qu’avant lui le PSG n’existait pas, quand Neymar, fraîchement arrivé à Paris, livre dans une interview que son plus beau moment de footballeur est la remontada, qui intervient pour les recadrer ? Personne ! Tous les supporters ont été froissés par ces déclarations, et se sont sentis trahis par l’absence de réactions au sein du club. Seul le coach, toujours lui, se retrouve en première ligne et se voit obligé de fournir des explications bancales en conférence de presse. Mais ce n’est pas à lui de tenir ce rôle ! Le coach est là pour faire performer son équipe, mettre en place une tactique, élaborer un projet de jeu (et donc participer au recrutement)… Il doit également avoir la latitude, en cours de match, de sortir son ballon d’or qui pénalise l’équipe en n’effectuant aucun repli défensif… Mais non, à Paris, les choses ne fonctionnent pas ainsi. Le coach n’a pas son mot à dire : le ballon d’or doit jouer. C’est que le match est diffusé en Argentine, en Chine ou je ne sais où… donc peu importe son apport sur le terrain, le ballon d’or doit jouer.

En 2018, déjà, Arrigo Sacchi, coach emblématique du Milan AC, déclarait dans le quotidien L’Équipe : « Un joueur, aussi fort soit-il, n’est pas un projet. Tout part du club, de sa vision, de ses règles, de son leadership. Le club vient avant l’équipe, et l’équipe avant chaque individualité. J’ai la sensation que cette hiérarchie des valeurs est inversée au PSG. » 5 ans plus tard, cette sensation a malheureusement pris de l’épaisseur au sein du club de la capitale, et les stars, plus que jamais, jouissent de passe-droits qui semblent, encore une fois, faire réfléchir les (grands) entraîneurs avant de s’engager dans le projet parisien…

L’organigramme en question

Nasser, entouré de Christophe Galtier et Luis Campos,
est-il toujours l’homme de la situation ?

Depuis 2011, l’organigramme du PSG se définit, dans les grandes lignes, de la manière suivante :
. Un président, véritable patron et propriétaire du club, en la personne de l’émir Tamim ben Hamad Al Thani. Il intervient peu dans le quotidien parisien, mais gère depuis Doha les dossiers les plus « brûlants » (prolongation de Mbappé, transferts de Neymar et de Messi…).


. Un président délégué, Nasser al-Khelaïfi. Concrètement, c’est lui qui est en première ligne et qui gère les affaires courantes.


. Un directeur général délégué, chargé de l’administratif et du volet « développement économique et merchandising » du club. En place depuis 2011, Jean-Claude Blanc a laissé son poste début 2023 au duo Victoriano Melero/Marc Armstrong.


. Un directeur sportif, chargé du projet sportif et donc, entre autres, du recrutement. Luis Campos occupe actuellement le poste, après avoir succédé à Leonardo l’été dernier. 

Si Nasser est mobilisé sur beaucoup d’autres fronts (il est également le président du groupe BeIN, de la fédération qatarie de tennis et de squash, de l’association européenne des clubs, du groupe Qatar Sport Investissement) c’est bien le poste de directeur sportif qui, depuis trop longtemps, cristallise les attentions.

Si les premiers pas de Leonardo, de 2011 à 2013, se montrent concluants, son (premier) départ laisse un énorme vide. Olivier Létang occupe alors officiellement le poste de « directeur sportif adjoint »… sans qu’il existe de directeur sportif ! L’erreur est réparée en nommant ce dernier au poste de directeur sportif, mais c’est bel et bien Nasser qui, la plupart du temps, intervient personnellement pour gérer les transferts. Létang sera secondé dans sa mission quelques temps plus tard par un certain Patrick Kluivert, nommé au poste nébuleux (pour ne pas dire fictif) de “directeur du football”. On se souviendra toutefois que c’est le Néerlandais qui a finalisé le recrutement de Jesé en provenance du Real Madrid (joli tableau de chasse !).

Ce bricolage semble prendre fin à l’été 2017. La nomination d’Antero Henrique, découvreur de talents depuis plusieurs années au FC Porto, suscite un élan d’optimisme. Mais des tensions vives avec Emery puis Tuchel révéleront ses difficultés à travailler en équipe et à accéder aux desiderata des entraîneurs en place (concernant notamment le recrutement d’un milieu défensif). La situation n’est plus tenable et en juin 2019, Antero Henrique laisse son poste à Leonardo qui revient au club 6 ans après l’avoir quitté.

Même si le PSG atteint la finale et la 1/2 finale de LDC, ce deuxième mandat n’est pas aussi convaincant que le premier. D’abord englué dans le dossier Neymar (qui veut retourner au Barça), il se chamaille avec Tuchel (qui sera remercié en décembre 2020, remplacé par Pochettino) et fait signer au club de nombreux joueurs qui ne donneront pas satisfaction (Herrera, Sarabia, Diallo, Icardi, Rafinha, Wijnaldum, Donnaruma…). En outre, avant de quitter ses fonctions en mai 2022, il ne remplit pas sa mission de dégraisser la masse salariale.

Aujourd’hui, sur le site du PSG, on peut lire que Luis Campos est le « conseiller football » du club. En charge du recrutement, il a pour mission de « mettre de l’excellence et de la rigueur au cœur du projet parisien ». En théorie, les problèmes semblent avoir été ciblés et de l’ordre va être remis dans la maison PSG. C’est ce que l’on pense du moins… Car, dans la foulée (pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?), Antero Henrique revient au club, officiellement pour négocier les transferts ciblés par Campos. Mais, dans les faits, ce dernier démarche directement certains joueurs, dépassant ses prérogatives et empiétant sur les plates-bandes d’un Campos de plus en plus agacé.

L’organigramme du PSG est de moins en moins lisible.

Mais alors ? Qui fait quoi ? Cela demeure très flou et cette question revient inlassablement quand on essaie d’y voir plus clair sur la répartition des tâches dans l’organigramme du club parisien. Ce qui est limpide, en revanche, c’est que des joueurs comme Carlos Soler, Fabian Ruiz, Renato Sanches ou encore Hugo Ekitike ont été recrutés, pour mettre de l’« excellence » (!) dans l’effectif, comme le stipule très clairement le cahier des charges.

Maintenant, pour savoir qui est vraiment responsable de ces arrivées, c’est un petit plus compliqué, chacun des deux portugais se montrant étonnamment discret au moment d’assumer ces erreurs de casting, qui, en tout état de cause, n’étaient certainement pas les premiers choix de Christophe Galtier.

On ajoutera qu’il est assez cocasse d’entendre régulièrement le technicien parisien vanter les mérites et la fiabilité du soldat Danilo Pereira, joueur exemplaire par son investissement et son état d’esprit, quand on sait que celui-ci figurait l’été dernier tout en haut de la liste des joueurs à transférer dressée par Campos…

On comprend que tout cela ne respire pas vraiment le travail en harmonie et en concertation au niveau du staff. Voilà matière, une fois de plus, à faire réfléchir à 2 fois les grands entraîneurs au moment de s’engager dans le projet parisien.

Conclusion

Au PSG, ainsi va la vie : on choisit un coach qui doit tirer le meilleur d’un groupe qu’il n’a pas choisi, le laissant se dépatouiller tout seul face aux médias quand les dysfonctionnements apparaissent au grand jour. Bref, sans aller jusqu’à dire qu’on lui savonne la planche, on ne le place pas dans les meilleures conditions.


Voilà pourquoi, avec une feuille de route aussi alambiquée et périlleuse, les « grands » entraîneurs ne se disputent pas un poste qui s’apparente à un nid de guêpes. 

Mais, dans ce contexte aussi pesant et dans un environnement aussi complexe, est-il vraiment possible de dénicher l’oiseau rare ? Le doute est permis… et la vraie question n’est-elle pas : l’oiseau rare existe-t-il ?

Les supporters du PSG, eux aussi, aimeraient
arborer un large sourire, signe d’une cohérence
retrouvée au sein du club.

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